English revolution
Dans l’Angleterre crasseuse et sauvage du xviie siècle, un prêtre et des déserteurs de la guerre civile deviennent les pantins d’un alchimiste qui a glissé dans leur ragoût une poignée de champignons hallucinogènes pour les convaincre de partir en quête d’un mystérieux trésor planqué dans un champ. A Field in England, le nouveau film du Britannique Ben Wheatley avait déjà de quoi surprendre à l’étape du scénario, complètement farfelu.
Adepte d’un cinéma réaliste et ultra violent, entre Ken Loach et Tarantino, habitué aux tournages express (deux ou trois semaines quand la norme se situe à cinq ou six) et aux micro budgets, le réalisateur de Kill List et de Touristes fait encore plus fort.A Field in England a été tourné en douze jours, à l’automne dernier, avec pour seul décor la prairie du titre et 350 000 euros. Le résultat, quatre-vingt onze minutes de trip psychédélique en noir et blanc, ne ressemble à rien de connu. Ou alors à la très improbable alliance de Gaspard Noé (Enter The Void) et de Peter Watkins (La Bataille de Culloden).
Interrogé par The Guardian, Ben Wheatley avoue son penchant pour les « midnight movies », ces films violents ou provocants tournés en marge du système hollywoodien dans les années 60 et 70 et diffusés à la télévision à minuit. « J’aime ce genre de films et j’ignore pourquoi plus personne n’en tourne aujourd’hui. Tout était permis, même le très mauvais goût, je suis à fond pour. On y voyait des gens chier, prendre de la drogue, montrer leur bite, il y avait une folie et un montage très vif, pour que ça soit à la fois basique mais quand même une œuvre d’art. Mais surtout, toujours malpoli. » (1000 merci à J. Couston, pour cet article publié sur le site de Télérama, et grâce à qui nous sommes partis en chasse de ce joyau)
On voudrait ajouter qu’inédit, A field in England risque fort de le rester – du moins en France. A la vision de l’objet, partagé entre l’effroi, la souffrance, l’hilarité, la stupéfaction, la transe et l’admiration, on se demande bien qui, à part nous, prendrait le risque de miser 50 cents dessus, même pour presser un DVD ou, comme ce fût fait chez nos voisins grands-bretons décidément au top de l’élégance, éditer une VHS. Après un tel exploit, on pressentirait même une poursuite de carrière, disons, difficile, pour ce sale gosse prodige du cinéma anglais. Pensez donc, le meilleur est encore à venir : le gaillard a réussi à placer un projet à 15 M$ à Hollywood !